ForumPHP 2025 : Au cœur d'une révolution silencieuse
Publié le 13 octobre 2025
Il y a des conférences qui se contentent de marquer le temps. Et puis il y a celles qui le redéfinissent.
Le Forum PHP 2025 appartient à la seconde catégorie. Niché dans le cadre bien connu de l'hôtel New York - The Art of Marvel à Disneyland Paris, l'événement avait une saveur particulière.
On célébrait les 30 ans de PHP. Une génération. C’est plus vieux qu’une bonne partie des 18 collaborateurs des Tilleuls qui étaient présents à cette édition !
On aurait pu s'attendre à un simple regard dans le rétroviseur. C'était mal connaître l'état d'esprit d'un écosystème en pleine ébullition.
Ce qui s'est joué n'était pas une commémoration. C'était une puissante déclaration d'avenir.
Ce compte-rendu est une invitation à revivre (un peu) ce moment. Nous allons le vivre à travers les yeux de nos collaborateurs sur place : Vincent Amstoutz, Julien Lary, Alex Guyot et Emmanuel Averty. Leurs notes et leurs avis seront notre boussole.
Oubliez ce que vous pensiez savoir sur PHP. Le voyage commence maintenant.
Premier Jour : Les fondations, les frontières et l'effet FrankenPHP
La première journée a donné le ton. D'un côté, on célèbre les piliers comme Symfony. De l'autre, on pousse vers de nouvelles frontières.
L'IA. La performance.
Et un nom sur toutes les lèvres : FrankenPHP.
La conférence d'ouverture de Nicolas Grekas a été une projection vers le futur.
Symfony 8, c'est avant tout un grand nettoyage. Vincent a noté les chiffres : 4 000 lignes de code ajoutées, 39 000 lignes supprimées.
"Un travail conséquent de la communauté", souligne-t-il. Cette nouvelle version exigera PHP 8.4 et supportera les native lazy objects.
Mais le plus frappant, c'est la symbiose. Symfony fournit la base stable. La communauté innove autour avec des projets comme API Platform ou Symfony UX.
Vincent a été surpris d'apprendre que la gestion des variables d'environnement fut un vrai défi pour le framework, une fonctionnalité devenue essentielle avec l'arrivée de services comme Heroku!
Son ressenti final? "Une conf dynamique... On est enthousiasmé et on ressort avec hâte de tester la version 8.0 dans nos projets".
Le ton était donné.
La discussion sur l'IA a suivi deux chemins. Le "comment" technique, et le "pourquoi" stratégique.
Edouard Courty, avec "Créer un serveur MCP avec Symfony", a plongé dans la technique. Le Model Context Protocol (MCP) est un standard qui permet aux IA d'agir, pas seulement de parler. Elles peuvent interagir avec des fichiers, des bases de données, des services.
Nos collaborateurs ont eu un regard nuancé. Pour Julien, c'était "une bonne entrée en matière". Il a cependant noté un oubli : l'initiative officielle Symfony AI.
Interrogé, le conférencier a reconnu que c'était le choix le plus pérenne. Alex, lui, a apprécié la démarche pédagogique, loin des "posts LinkedIn bien aguicheurs".
En contraste, Xavier Leune a pris de la hauteur avec "Comment être une bon·ne dév à l'heure des IA génératives?".
Une réflexion sur l'évolution de notre métier. Il a partagé des retours de CTOs : gains de productivité "x2 ou x3", moins de bugs.
Mais un effet inattendu : les Product Managers "n'arrivent plus à suivre la cadence".
Pour Julien, un "ted talk pour Lead Dev/CTO, ça change et c'est bien". L'affluence, notée par Alex, a montré que ces questions stratégiques préoccupent autant que la technique.
L'obsession pour la vitesse a été un thème majeur, avec FrankenPHP en tête d'affiche.
Dans "FrankenPHP en dehors des sentiers battus", son créateur, Kévin Dunglas, a dévoilé les fonctionnalités avancées de ce serveur d'applications, désormais soutenu par la PHP Foundation.
Au-delà du mode worker, on a découvert le support des 103 Early Hints pour accélérer le chargement, et l'intégration de Mercure pour le temps réel.
Mais la vraie révolution, c'est la possibilité d'écrire des extensions et des workers en Go. Ce renouveau est porté par nos coopérateurs Kévin et Alexandre Daubois.
Ce premier a présenté des exemples concrets : un transport pour Symfony Messenger, un serveur WebSocket, et même du gRPC, le tout écrit en Go. PHP peut maintenant déléguer les tâches de haute performance à un langage plus adapté, sans quitter son écosystème. On avait déjà eu un sacré avant-goût de tout ça à l’API Platform Conference qui s’est déroulée le mois dernier. Pendant ce laps de temps, Kévin est allé encore plus loin.
Cette idée a été renforcée par la conférence "PHP, sans PHP", qui a montré comment packager une application en un seul binaire exécutable, sans aucune dépendance.
Emmanuel a trouvé la conclusion de Jean-François Lépine amusante et pragmatique : "utilisez plutôt FrankenPHP, vous embêtez pas avec ce que je vous ai dit".
La journée s'est finie sur des lightning talks, des histoires courtes qui ont capturé l'âme de la communauté.
Le récit d'Alexandre Daubois a été particulièrement touchant. Il a partagé son parcours, depuis ses débuts en 2015 où on lui disait que "PHP et le web, ça n'a aucun avenir", jusqu'à sa première conférence devant 600 personnes.
Outre l'intuition de ses débuts complètement à côté de la plaque quant aux technologies du web, son histoire de lutte contre le syndrome de l'imposteur, un thème qu'il explore aussi dans ses écrits, a trouvé un écho puissant.
Ces histoires, qu'elles soient inspirantes, pratiques ou ludiques, ont révélé le véritable moteur de PHP.
Car le succès du langage n'est pas que technique. Il est humain. Et ça fait du bien de le rappeler !
Second Jour : Maîtriser l'écosystème et regarder vers l'avenir
La deuxième journée s'est concentrée sur la maîtrise des outils modernes et la vision des leaders de l'écosystème.
Notre coopérateur Clément Talleu a rendu accessible une des architectures d'IA les plus puissantes du moment : le Retrieval-Augmented Generation (RAG).
Le principe est finalement assez simple sur le papier : pour éviter les "hallucinations" des IA, on leur fournit un contexte fiable, extrait de nos propres données. Le talk a brillamment décomposé le processus :
- Découpage (Chunking) : Le texte source est découpé en petits morceaux.
- Vectorisation (Embeddings) : Chaque morceau est transformé en une représentation numérique (un vecteur mathématique, dans ce cas).
- Stockage : Ces vecteurs sont stockés, par exemple dans PostgreSQL avec l'extension pg_vector.
- Recherche : La question de l'utilisateur est aussi transformée en vecteur pour trouver les morceaux de texte les plus proches.
- Génération : Ces morceaux sont injectés dans le prompt envoyé à l'IA, qui peut alors formuler une réponse précise.
La présentation a mis en avant des outils comme LLPhant et l'initiative Symfony AI. L'avis d'Alex a confirmé le succès de la session : "Ravi de la présentation... le sujet était vraiment accessible et le POC présenté pour illustrer était clair".
Tout ce qu’on demande avec ce genre de sujet parfois obscur, et pourtant résolument dans l’air du temps.
Nicolas Grekas a offert une masterclass sur l'injection de dépendances. Vraiment. Son conseil : soyez "suffisamment paresseux".
Il a pointé du doigt un coupable fréquent des problèmes de performance : les Event Listeners, qui peuvent instancier de nombreux services à chaque requête, même s'ils ne sont pas utilisés.
La solution? Le "lazy loading" bien sûr !
Nicolas a démontré des techniques avancées pour ne charger les services qu'au moment de leur utilisation, avec des attributs comme #[Lazy] ou #[AutowireMethodOf].
Emmanuel est conquis : "une conférence de qualité... il a présenté des use cases très spécifiques pour une optimisation maximale".
Dans la même veine, Felix Eymonot a démystifié "Sous le capot de Composer".
Un moment clé, noté par Emmanuel, a été la présentation de la commande d'optimisation pour la production : composer install --no-dev --optimize-autoloader --apcu-autoloader.
La réaction de l'audience a été immédiate : "On a vu beaucoup de gens prendre des notes ou lever leur portable pour prendre la photo de la commande".
Pour Emmanuel, cela prouve que "ce genre de conférences qui rappellent des bases sont toujours nécessaires".
Le moment phare a été la table ronde sur "The Future of PHP and the PHP Foundation", avec Gina Banyard, James Titcumb, Nicolas Grekas et Kévin Dunglas.
La discussion a clarifié le rôle de la PHP Foundation : financer des développeurs pour maintenir et faire évoluer le langage, et ainsi résoudre le bus factor. Vous savez, cette analogie (un peu glauque, on vous l'accorde) qui vous invite à réfléchir si votre projet peut continuer son évolution de manière pérenne si un des membres de votre équipe passe sous un bus.
On est d’accord, ce n’est pas la vision la plus réjouissante. Mais c’est un exercice de pensée efficace et réellement utilisé dans le monde de la tech.
La Fondation ne remplace pas le processus des RFC, mais le soutient.
L'impact est déjà là. Kévin Dunglas a affirmé que FrankenPHP "n'aurait pas pu exister sans l'aide des devs de la PHP Foundation".
C'est un catalyseur d'innovation.
Ce Forum PHP 2025 a montré à nouveau un écosystème qui a trouvé un équilibre remarquable. À trente ans, PHP est mature, avec une gouvernance professionnelle incarnée par la PHP Foundation.
Mais cette maturité n'est pas de la stagnation. L'écosystème innove agressivement, repoussant les limites avec FrankenPHP. Il intègre pragmatiquement l'IA, en construisant des outils concrets pour résoudre des problèmes réels.
Finalement, ce qui ressort, c'est la force de la communauté. Une communauté qui, comme l'a si bien ressenti Alex en sortant de la keynote de fin, reste "accueillante et bienveillante".
Après trois décennies, elle est plus énergique et tournée vers l'avenir que jamais. Le voyage continue.
On a déjà hâte de l’année prochaine.
